Germinal :
Deux mondes opposés : les mineurs et les bourgeois ; deux mondes
antithétiques et symétriques.
Explication sur les
personnages :
I) Trois familles
de mineurs :
- Les Levaque : Lui est haveur ; elle, la maîtresse de leur
logeur. Il s ont deux enfants : Bébert (12 ans) et Philomène (19 ans), maîtresse
de Zacharie Maheu. Le père Levaque est un homme brutal, et peu intelligent (il
embrouille tout chez les Hennebeau, lors de la réunion des délégués) tandis
que la mère se fait remarquer par sa saleté.
- Les Pierron : Lui est chargeur ; sa seconde femme est la maîtresse
du maître-porion Dansaert. Ils apparaissent hypocrites et ambitieux. Pierron
facilite les relations de sa femme pour être bien considéré par la direction.
La mère de la Pierronne est La Brûlé, décrite comme une “vieille sorcière”.
- Les Maheu : A l’opposé des autres familles, les Maheu ont peu
de défauts. Maheu, la Maheude et Catherine (l’une de leurs filles) sont
travailleurs, courageux et pleins de bon sens. Ils apparaissent à coté d’Étienne
Lantier comme les héros positifs du roman.
Toussaint Maheu (42
ans) et la Maheude (39 ans) ont 7 enfants :
Zacharie (21 ans)
Catherine (15 ans)
Jeanlin (11 ans)
Alzire, bossue (9
ans)
Léonore (6ans)
Henri (4 ans)
Estelle (3 mois).
La misère matérielle
est un thème récurrent. Du début à la fin, le problème des mineurs et de la
famille Maheu en particulier est celui de trouver de quoi manger et
l’obsession de la nourriture devient de plus en plus grande à mesure que la
grève se prolonge. Les ouvriers sont souvent appelés par les bourgeois comme
par le narrateur des “meurt-de –faim”.
Le narrateur a su ménager
des parallélismes entre le lever chez les Maheu dans l’intérieur
rudimentaire d’une maison de coron et celui de la famille Grégoire (en
particulier en soulignant la différence entre le sort de Catherine et celui de
Cécile). La description des intérieurs bourgeois confortables, voire cossus
(salon des Grégoire, salle à manger des Hennebeau) donne à voir l’inégalité
criante des situations.
II) Trois familles
bourgeoises :
- Les Grégoire apparaissent comme des gens aisés et charitables, croyant faire le bien, mais campant sur leurs préjugés. Le père Grégoire est “actionnaire oisif”, tandis que Mme Grégoire est une maîtresse de maison aidée de nombreux domestiques. Ce couple assez âgé (une 60aine d’années) met tout espoir dans Cécile (18 ans), leur fille qu’ils adorent et qu’ils rêvent de marier à l’ingénieur Négrel.
- Les Deneulin : Deneulin est “patron” des mines de Vandamme, Jean-Bart et Gaston-Marie, il personnifie en quelque sorte le capital. Il se heurte frontalement avec les ouvriers (Étienne, III,5 ; avec Chaval, V,1). Par rapport à Hennebeau et à Grégoire, il est seul à avoir conscience des difficultés des mineurs :“Il faudrait produire davantage : autrement, la baisse se porte sur les salaires et l’ouvrier a raison de dire qu’il paie les pots cassés“. Mais en même temps, il se montre impitoyable :“Sa pigne d’homme amoureux des gouvernements forts se serrait, de peur de céder à la tentation d’en saisir un apr le col.”
Veuf, il a deux filles cultivées : Lucie travaille le chant tandis que Jeanne fait des études aux Beaux-Arts. Elles portent sur le monde ouvrier, et la marche des mineurs en colère un regard d’artiste.
- Les Hennebeau :Ils font pendant avec les Maheu. Ceux ci ont accueilli Étienne Lantier, eux Paul Négrel, neveu de Mr Hennebeau. Ces deux jeunes gens se ressemblent d’ailleurs physiquement.
Étienne Lantier : “très brun, joli homme, l’air fort malgré ses membres menus”. Il a un “visage fin” et des “moustaches noires”.
Paul Négrel : “était un garçon de 26 ans, mince et joli, avec des cheveux frisés et des moustaches brunes. Son nez pointu, ses yeux ifs lui donnaient un air de furet aimable”.
Mr Hennebeau, d’origine modeste a gravi les échelons de la société minière et se retrouve “directeur” salarié de la mine de Montsou. Il est ingénieur (École des Mines) et doit surtout son aisance à son riche mariage avec Mme Hennebeau, issue d’une famille d’industriels (filatures d’Arras). Contrairement à Deneulin qui analyse lucidement la situation, Mr Hennebeau apparaît souvent dépassé par la situation. Il se préoccupe surtout de ses déboires sentimentaux (Mme Hennebeau le trompe avec Négrel). C’est certainement elle qui apparaît comme le personnage le plus antipathique. Grande bourgeoise méprisante, elle ne se préoccupe que d’elle même et lors de la visite du coron vante outrageusement les bienfaits du patronat :“Elle s’indignait de l’ingratitude du peuple”.
Paul Négrel est un jeune ingénieur ambitieux mais courageux. Comme Deneulin, il est sur le terrain. Républicain, soucieux du mérite, il n’en est pas moins féroce, surtout en paroles. Il aime provoquer la peur des bourgeois (plaisanterie sur l’odeur du peuple, V,5), mais cède aussi à l’angoisse.
Au total, on voit que les oppositions entre les jeunes femmes (Cécile, adulée et inconsciente / Catherine, exploitée, méprisée, à bout de force mais digne), entre les jeunes gens (Négrel, actif lucide mais cynique et individualiste / Étienne, idéaliste et courageux, mettant ses forces intellectuelles au service de la collectivité), les femmes d’âge mûr (Mme Hennebeau, coquette, égoïste et méprisante / La Maheude, généreuse, déterminée, s’éveillant à la réflexion sociale) font pencher notre sympathie vers les mineurs. Cependant, ceux-ci ne sont pas tous décrits de façon positive, au contraire : Pierron est traître, Chaval est brutal (nom significatif de sa bestialité), Levaque est borné, les enfants Maheu (notamment Jeanlin) sont porteurs de tares. On voit ici que Zola a modulé sa vision, laissant à des personnages ouvriers secondaires le poids d’une lourde hérédité (selon les principes naturalistes) mais il a fait d’Étienne et de Catherine le couple amoureux unissant des héros courageux et généreux, tout comme le couple des parents Maheu) grandis par leurs souffrances et leur abnégation. Mais surtout les mineurs apparaissent comme de vrais personnages de roman et ce mérite sera reconnu par les ouvriers des mines défilant dans le cortège funèbre de Zola au cri de “Germinal !”.