ZOLA : Texte 3 : Partie II, chapitre 2

Il s’agit d’une scène romanesque, d’environ 2 – 3 pages. L ’histoire et la narration sont quasiment simultanées.

C’est une scène de fausse charité, elle est donc frappante. C’est aussi une scène de malentendus, de quiproquos.

Au début, il y a un fossé entre ce que pense la Maheude et ce que pensent les Grégoire. Petit à petit, le fossé se réduit. A la fin, la Maheude comprend qu’elle n’aura pas les 100 sous.

Ce qui est mis en scène c’est le choc de deux mondes (partie 1), puis le jeu du narrateur, qui organise le malentendu tragique (partie 2).

 

I) Le choc de deux mondes :

         1.1) les bourgeois :

M. et Mme Grégoire, leur fille Cécile (18 ans) + les domestiques (ici, deux bonnes : Honorine, Mélanie) -> même appréciation que leurs maîtres (confort des bourgeois.)

La scène montre que Cécile est plus généreuse, plus spontanée que ses parents (“Oh ! les pauvres mignons”)

Elle donne de la brioche aux enfants.

Cécile apparaît entière ; elle matérialise le don (vêtements : commandés par les parents. La brioche : mise en scène de Cécile.)

Tout est organisé : le don n’est pas spontané. Ce n’est pas un véritable don, mais une réutilisation de ce dont ils n’ont plus besoin. Les Grégoire se donnent simplement bonne conscience. Ils prétendent adhérer à des valeurs auxquelles ils tiennent (la charité,…).

On voit très bien que les Grégoire tiennent à cette pratique chrétienne puisqu’ils la mettent au centre de l’éducation (l.5). Ils font la charité, à laquelle ils croient, ce qui rentre en conflit avec la sacralisation de l’argent (l.10 et suivantes)

Les mineurs sont considérés comme des personnes s’adonnant à la boisson, comme des personnes sans retenue.(“Sept enfants, mais pourquoi ?”)

Mépris des bourgeois vis à vis des mineurs. Les bourgeois s’indignent du grand nombre d’enfants, de tel que la Maheude a un vague geste d’excuse.

Question “Pourquoi” -> cruauté sournoise.

Discours moralisateur implicite de la part des bourgeois, qui savent eux se retenir.

Idée de confort repus (abondance de chaleur, …)

Allitérations significatives.

Attachement au confort, à leur image charitable (ils s’attendrissent sur eux mêmes.)

 

         1.2) Les prolétaires, représentés ici par la Maheude et ses enfants.

Étourdissement en entrant chez les Grégoire (différence de conditions matérielles.)

Essentiel pour la Maheude : obtenir la pièce (achat de nourriture)

Elle pense que les bourgeois seront compréhensifs envers sa situation (habituée à la solidarité, valeur importante chez les prolétaires.)

La Maheude se trouve à la merci des évènements et recherche de l’argent pour survivre. Elle est soumise à une sorte de fatalité (maternité, misère)

La Maheude représente une valeur, elle se caractérise par son courage et par sa dignité.

l.29 et suivantes : elle pense que les bourgeois vont la comprendre (naïveté). La Maheude dit ce qu’elle pense, alors que les bourgeois sont hypocrites.

 

II)

2.1) Le jeu des points de vue

Plusieurs points de vue internes sont adoptés (on a accès à plusieurs points de vue des personnages)

Multiplicité des points de vue.

 

a) Le point de vue des pauvres :

Dès le début de l’extrait, on a le point de vue de la Maheude et de ses enfants.

“De ce vieux monsieur et de cette vieille dame” -> point de vue des enfants.

Mais massivement point de vue de la Maheude.

 

b) opposition : pt de vue des bourgeois, des bonnes.

Point de vue de personnages secondaires ; point de vue des Grégoire, relayé par l’intermédiaire du style indirect libre, introduit de manière omnisciente.

“Il fallait être charitable” -> “Il les buvait”

“Ils ne donnaient jamais…”

On a accès à ce que pensent les personnages. Décalage entre ce qu’espère la Maheude et la position habituelle des Grégoire.

La Maheude pense ce qu’elle dit tandis que les Grégoire gèrent cette mise scène de charité alors qu’ils se méfient des pauvres.

 

         2.2) La caractérisation du langage des personnages :

Que ce soit dans les passages de dialogue ou de récit, on voit que Zola a su restituer le langage de chaque personnage (point de vue sociologique.)

Depuis l’Assommoir, Zola essaie de rendre le mieux possible le langage populaire.

 -> style indirect libre, argot.

Il veut rendre l’“odeur du peuple”.

Bourgeoisie : confort, propreté, hygiène.

Peuple : réputation de sentir mauvais.

a) Le langage populaire de la Maheude s’exprime autant dans des passages de dialogue que dans les passages indirects libre.

Elle a une facilité à parler, bien qu’elle hésite, qu’elle bégaie au début ; mais façon de parler approximative.

Emploi de “béquilles verbales” : “Que voulez-vous”, “voyez-vous”. Mots et tournures de phrases très généraux, syntaxe familière.

Emploi fréquent de “ça”.

l.48 : “Fallait quand même nourrir les petits qui ne fichaient rien.”

La Maheude semble dépassée par le poids de sa famille.

Elle parle comme quelqu’un d’ignorant, qui contraste avec le langage des Grégoire.

Langage approximatif mais expressif.

“Ils sont là dedans depuis des éternités”.

Ils sont dans la mine depuis des décennies / une éternité.

Elle sent instinctivement la portée hyperbolique de l’expression “une éternité”. Elle renforce cette portée hyperbolique en employant le pluriel.

 

b) A l’opposé, il y a le langage de M. Grégoire, mots recherchés, voire savants, médicaux.

“dégénérescence“, “anémie”.

Regard d’un médecin qui diagnostique la misère.

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