RIMBAUD :
Illuminations, 1873- 1875
“Les ponts”
Naissance : Charleville, 1854. Élève indiscipliné, fugue à plusieurs reprises. Ses premiers textes sont inspirés de Victor Hugo. Rencontre avec Verlaine déterminante (-> Illuminations). A partir de 1875, silence poétique. Meurt à Marseille en 1891.
Illuminations :
recueil de poèmes (environ 40) en prose (différent des vers classiques.).
C’est un nouveau
genre dans le poétique ; il apparaît au XIXe siècle (1er écrit :
Aloysius Bertrand, auteur méconnu qui n’a pu publier de son vivant.)
Mais Rimbaud est
le plus connu ; il renouvelle le genre.
“Petits poèmes en
prose”
“Le Spleen de
Paris” (2e nom du poème.)
“Illuminations”
contient 3 poèmes dédiés à la ville : 2 “villes” et un “ville”.
La ville portuaire,
chargée d’histoire (Londres), évoquée à travers le poème “Les ponts”,
qui est par ailleurs le seul poème ayant un déterminant. Les ponts de Londres
sont décrits.
Mise en scène de
cette ville, mise en scène théâtrale et musicale. On a l’impression qu’il
nous raconte une histoire. Le style apparaît fantastique, climat assez proche
du conte, féerique. Sujet essentiel de ce “tableau” : les ponts.
Comme s’il évoquait
de manière picturale la ville. Mais image mobile, animée de manière fugitive
(opéra, carnaval)
I) Le poème se présente comme un tableau
1.1) Le tableau abstrait
Évocation visuelle
de la ville. Dès la première phrase, on est plongé dans l’atmosphère de la
peinture. (ciels : fonds en peinture)
Attention particulière
aux couleurs et aux nuances.
“veste rouge”
“rayon blanc”
“gris de cristal”
Terne
pureté et luminosité
Expression presque
oxymorique.
Eau grise bleue (sûrement
la Tamise)
5 occurrences de
couleurs, dont 2 grises.
Gris -> brouillard
-> fog anglais.
L’œuvre se rapproche de celle de Turner “Lyons”
Grand paysagiste
anglais, donne une importance particulière au ciel et à l’eau.
->
L’impressionnisme (Monet, …) -> Tamise, Seine.
Surtout ciels brouillés
(valorisation des impressions de lumière.)
1.2) Les lignes
“droit”,
“angles”, “figure”, “bombés”, “obliquant” -> se rapportent
au dessin, presque industriel. Lignes horizontales, verticales valorisées.
(“canal”, “mâts”, “longs”.
Esquisse, gravure.
Impression différente de celle perçue dès la première phrase. Les phrases 2,
3, 4 décrivent le dessin de ces ponts. Vision étendue, impression donnée par
la multiplicité des ponts, impression qu’ils s’enchevêtrent (enchevêtrement
des lignes.), -> sorte de dessin géométrique.
Le dessin géométrique
prend le pas sur la géométricité.
Le poète serait-il
sur un bateau ?
A partir de la carte,
construction du paysage (Rimbaud étant allé à Londres, -> carte pour
visiter)
“Ponts chargés de
masures”-> Moyen Age, anciens ponts (Paris, jusqu’au XVIIe siècle).
-> Inspiration
d’une gravure (peut-être reproduite dans le plan de la ville).
“longs et légers”,
“frêles parapets” ponts presque aériens, abaissant les rives ; ponts
en train d’élever le paysage. Vision de plus en plus complexe, évolution du
paysage, animation.
Rédaction en prose :
souplesse, fluidité. -> superposition des visions.
Ce qui est donné à
voir est finalement un spectacle dans lequel la musique a une réelle
importance.
II) Le spectacle,
comédie fugitive.
2.1) Des accords musicaux
C’est une
transition musicale.
Tableau ->
musique, mouvement -> spectacle.
Rimbaud joue sur les
métaphores et la polysémie.
Correspondance
musicale entre le dessin et la musique (vue / ouïe)
->
Voir Baudelaire, “Correspondance”, p243.
Ponts : ce qui
relie les berges, les accordent.
Accords :
relations, raccordement.
Réseau lexical de la
musique.
“Cordes” : Câbles
soutenant les ponts.
Instruments
à cordes.
“On distingue”
-> On voit ? On entend ?
Le poète joue sur
plusieurs tableaux à la fois.
2.2)
La parade
Titre d’un autre poème
des “Illuminations”. Vision d’une parade, d’une fanfare costumée (veste
rouge, allusion à d’autres costumes) dont on ne distingue que des touches de
couleur, cortège bariolé.
Il est souvent question dans les “Illuminations” de fanfares, de
parades, où les sensations visuelles et auditives sont mêlées. Rimbaud invite
le lecteur, et dérobe la perception ; il introduit le doute. Il fait
rentrer dans son jeu le lecteur, invité à cet étrange spectacle.
2.3) Le rayon blanc
Le rideau de lumière
tombe, éclaire l’atmosphère. -> Le brouillard disparaît, qui par ses
formes floues permettait à l’imagination de voguer librement.
Chute du texte :
“tombe et anéantit”.
C’est une dernière
phrase de clôture, matérialisée par un tiret, important : il marque une
rupture et isole cette chute du texte.
Précision “du haut
du ciel” -> peut faire penser à un rayon divin, tombant du ciel comme
la foudre.
Le poète nous a fait
glisser du tableau,… et nous a guidé.
Figure du poète
magicien, qui a des pouvoirs de création divins -> poète démiurge.
Poésie en grec,
vient du verbe fabriquer.
Poète : crée
un autre univers.
Porteur de pouvoir de création,
mais il ne se prend pas au sérieux. (ébauche de carnaval, pour s’amuser,
pour nous inviter à faire pareil)
Comédie :
renvoie à la parade (fanfare)
Renvoie
à toute création.
Voir “parade”, “Illuminations”
(comédie magnétique), “Aube”, livre 2nde
“j’ai seul la clé
de cette parade sauvage.”
Parade avec des maîtres
jongleurs.
Conclusion :
Le poème “Les
ponts” est représentatif des illuminations.
Le poète nous invite à une succession de spectacles, où finalement le monde réel
se trouve magnifié, mais aussi brouillé.
“Cela s’est passé ;
je sais aujourd’hui saluer la beauté”